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Bruce Lee et sa flûte silencieuse
31 janvier 2015

THE SILENT FLUTE

LA FLÛTE SILENCIEUSE

RACONTEE PAR CEUX QUI L’ONT ENTENDUE


Le premier projet cinématographique de Bruce Lee était américain : The Silent Flute avait pour but d'asseoir l'importance des arts martiaux sous un jour nouveau. Mais en 1968, pour des producteurs de cinéma non initiés aux arts martiaux, ce scénario était plus occulte qu'une odyssée dans l'espace. Voici l'histoire de la flûte silencieuse racontée par ceux qui l'ont entendue...
(Interviews compilées par Gabriel Grid – Traduction de Christophe Champclaux pour les extraits des livres édités en France / Trad. de G. Grid pour les extraits des magazines américains inédits en France)

histoire_de_la_flute_silencieuse

DES ETOILES SE RENCONTRENT

STEVE MCQUEEN : Je ne suis pas un expert ou quoi que soit d'autres, je ne suis pas impliqué dans les arts martiaux à aucun degré. Bruce était juste un ami intime, et je veillais beaucoup sur lui. Je crois qu'il était brillant, un fin philosophe de la vie quotidienne. Il avait de bonnes intentions, et j'ai un grand respect pour ça.

BRUCE LEE : Quand je l'ai vu la première fois, je n'ai pas pu comprendre ce gars. Il était si méfiant envers moi et ça a pris du temps avant que j'arrive à bien le connaître. Mais une fois qu'il m'a accepté comme un ami, nous sommes devenus très proches. Comme élève, Steve peut être bon, parce qu'il est un travailleur acharné. Nous parlons en général de la vie, la philosophie, et nous nous entraînons un peu.

STEVE MCQUEEN : Lui et moi avions l'habitude de grandes discussions à ce propos, parce que peu importe le prix d'une voiture de luxe que vous achetez, combien de vêtements chers, peu importe ce que vous faites dans la vie, si vous ne vous connaissez pas, vous n'apprécierez jamais quoi que ce soit dans la vie. Bruce comprenait très bien ça. Je pense qu'il avait en lui une grande partie de la psychothérapie d'aujourd'hui. J'imagine qu'il a utilisé les arts martiaux comme une extension de lui-même. Mais il se connaissait aussi lui-même dans la vie de tous les jours.

BRUCE LEE : J'enseigne à Steve le Jeet Kune Do et il me donne des conseils sur le jeu d'acteur. Il ne cherche pas à me convertir à son style. Il pense que chaque acteur doit créer son propre style. Vous ne pouvez pas apprendre ça de n'importe qui. Les autres acteurs deviennent en colère contre lui parce qu'il ne voulait pas les soutenir. Il m'a dit que c'est plus important que je rencontre les bonnes personnes dans l'industrie du cinéma.

LINDA LEE : Le seul moyen de briser les barrières qui, à Hollywood, s'élevaient entre lui et son inévitable succès, restait, pour Bruce, de tourner un second rôle dans un film présentant des séquences d'arts martiaux. Là, il serait réellement sur l'écran, et le plus large public international pourrait découvrir les merveilles du kung fu mises en scène par lui-même...dans sa tête l'idée de La Flûte Silencieuse venait de naître.

STIRLING SILLIPHANT: Quand j'ai rencontré Bruce Lee j'avais entendu parlé de son extraordinaire rapidité et de ses possibilités. Je l'avais vu dans Le Frelon Vert dans lequel il jouait Kato. Je m'intéressais depuis un certain temps aux arts martiaux, mais j'étais à la recherche d'un style plus libre que ce que m'offrait le karaté à l'époque. Depuis quinze ans je portais un intérêt tout particulier aux philosophies orientales et surtout zen. Je sentais vaguement que les arts martiaux constituaient une extension de ces disciplines. Je me mis donc à la recherche de Bruce. Il me fallu six bons mois pour trouver quelqu'un ayant la possibilité de me présenter à lui, mais il vint finalement me voir à mon bureau de la Columbia. Je lui posais mon problème. Tout d'abord il refusa : « Je pense que vous êtes trop âgé. Il n'y a guère de chance pour que vos réflexes soient suffisamment rapides pour faire ce que je veux vous faire faire. » Je lui fit une petite démonstration de mes capacités et il sembla agréablement surpris du résultat. Il donna donc son accord et m'accepta comme étudiant. Bruce m'a enseigné énormément de choses, sans cependant me donner de leçons.

BRUCE LEE à GEORGE LEE (avril et septembre 68) : Dès qu'il aura fini de tourner Bullitt, Steve McQueen va prendre un scénariste pour démarrer un film de Kung Fu auquel je vais participer. Ainsi ce sera le démarrage de ce film. Je pars au Mississippi avec Steve McQueen. Le projet de faire un film sur le Jeet Kune Do franchit une nouvelle étape. Stirling Silliphant est impliqué dans l'écriture du script. Nous travaillons ensemble et ça roule.

STIRLING SILLIPHANT : Je suis allé avec Bruce une fois à la maison de Steve McQueen. Il enseignait le Jeet Kune Do à Steve à cette époque. Nous avons discuté avec Steve pour lui proposer The Silent Flute comme un projet de film potentiel. Nous avons dit que nous voulions faire un film qui n'a pas encore été écrit. Bruce avait une idée qui serait un film mettant en vedette Steve et lui-même et que je voudrais l'écrire. Steve était évasif... C'est juste sa nature, il n'aime pas dire les choses direct du genre «Bien sûr, je ferai le film ». Il doit être très sûr. Et nous parlions de quelque chose de tout à fait spéculatif qui n'avait pas encore été écrit. Bruce lui dit « Sois honnête » et McQueen répondit « C'est un film pour faire de Bruce Lee une star. Je t'aime bien mais ce n'est pas mon problème. Je ne vais pas te porter sur mes épaules ». Mais quand nous sommes partis de la maison de Steve, Bruce était en colère. Il avait senti le point sensible... que Steve dirait non. Et il avait perdu la face devant moi, parce qu'il m'avait apporté une superstar avec l'espoir que nous allions sortir de la réunion avec un accord. Il pensait que Steve dirait simplement «Bon, allez écrire le script, nous le ferons ». Pouvez-vous imaginer comme était immense la croyance que Bruce avait de lui-même? C'est à ce moment que Bruce m'a dit «Je serai plus grand que Steve McQueen! Qui est-il pour me dire qu'il ne fera pas ce film avec moi? Je serai plus grand! ».
Quelques semaines plus tard, je suis à une fête à la maison de Freddy Fields, alors à la tête de l'AMC ... et Jimmy Coburn était là. Je n'avais jamais rencontré Jimmy, mais je suis allé vers lui et je lui ai dit « je viens de voir votre film, Notre Homme Flint... Je pense que vous avez une souplesse naturelle et un bon style de coups de pied... Voulez-vous apprendre les arts martiaux auprès d'un maître? » Coburn a dit «Qui avez-vous à l'esprit? » « Bruce Lee », j'ai dit. Là ensuite, c'est avec lui qu'on a fait tout le travail sur La Flûte Silencieuse.

JAMES COBURN : J'ai rencontré Bruce grâce à Stirling Silliphant. Il m'a demandé ce que je connaissais des arts martiaux et je lui ai répondu « Très peu de choses, tout juste ce que j'ai fait pour la série des Flint ». Bruce m'expliqua que sa technique n'en était pas une, puisqu'elle englobait toutes les techniques existantes et que seul un individu pouvait faire ça. Il dit « Je peux vous fournir les outils, mais il vous appartient de découvrir votre manière personnelle de vous en servir. Venez, je vais vous montrer. Je peux vous frapper très violemment avec moins de deux centimètres d'élan ». Je pris un oreiller et il me fit basculer par-dessus la chaise, puis rouler jusqu'au divan. C'était vraiment drôle. J'ai dit « D'accord » et nous avons commencé à travailler ensemble, Bruce et moi. Je voulais savoir jusqu'où je pouvais aller. Mais Bruce, au fond, n'apprenait pas, il permettait d'apprendre. Il vous mettez dans des situations où vous deviez évoluer. Il vous apprenait un style, votre style, et apprenait à votre corps à s'y mouvoir.

BRUCE LEE à JHOON GOO RHEE (mars 69) : Nous avons eu vendredi dernier une réunion de travail sur le projet "Leng", Coburn, Silliphant et moi. Leng est le nom de code pour notre film d'arts martiaux. Leng est un mot chinois qui signifie "magnifique". Dans tous les cas ce sera une avancée majeure. Stirling ne s'est pas formalisé que son neveu Mark ait été écarté du travail d'écriture, et il est d'accord, ainsi que Coburn pour louer les services d'un professionnel pour ce travail. Nous allons accélérer le processus dès qu'un scénariste arrivera avec le premier jet. Nous avons une autre réunion la semaine prochaine. Tout se met en plan pour une énorme affaire.

STIRLING SILLIPHANT : Coburn et moi avions engagé un scénariste pour 12000 dollars. Le manuscrit qu'il nous a livré n'était que science-fiction et sexe. Il ne restait plus rien de l'idée que nous lui avions fournie. Alors nous l'avons remercié.

LINDA LEE : En désespoir de cause, ils décidèrent donc d'écrire entièrement leur scénario. C'était purement amical; il n'y avait aucune garantie de production. Les mois suivants, ils se sont réunis chaque lundi, mercredi et vendredi de 16h à 18h, en se promettant qu'il n'y aurait aucune interférence dans cet horaire: aucun oubli ou excuse de travail ou familial jusqu'à ce que ce soit terminé.

BRUCE LEE à GEORGE LEE : Nous préparons un scénario, Coburn, Silliphant et moi. Les stars en seront Coburn et moi. Nous espérons démarrer le tournage à la fin de cette année, si l'emploi du temps de Coburn le permet. Sinon, ce sera en mars prochain. Dans tous les cas, ce sera le début de quelque chose de vraiment, vraiment grand pour moi.

BRUCE LEE (octobre 69) : Il y eut une époque pour immortaliser le héros de western, puis l'escrimeur. Le tour de l'art martial viendra bientôt si je réussis à faire avec James Coburn un nouveau film dans lequel nous partagerons la vedette, The Silent Flute. J'aime beaucoup le travail d'acteur. Mon prochain rôle sera formidable. Il y aura plein d'artistes martiaux du monde entier. Nous tournerons au Japon.

BRUCE LEE : C'est une étude de l'évolution et de l'attitude d'un homme au fur et à mesure de ses rencontres, et qui se trouve confronté avec la mort et l'amour et cherchant la vérité vraie. Je pourrais jouer quatre rôles différents si je ne trouve pas de bons acteurs pour chacun des rôles. En plus d'être de bons acteurs, ils doivent aussi être d'excellents lutteurs.

BRUCE LEE à WONG SHEUNG LEUNG (janvier 70) : Récemment, j'ai constitué une société de production cinématographique. J'ai également écrit une histoire : La Flûte Silencieuse. James Coburn et moi jouerons dedans. Stirling Silliphant est l'auteur du scénario. C'est un fameux scénariste. Nous avons en projet de faire le tout premier film d'arts martiaux produit à Hollywood. Les perspectives sont bonnes. D'ici six mois, le tournage va commencer. Tous ceux qui vont participer au film sont mes élèves. Dans le futur, Steve McQueen pourrait également travailler avec moi. Je suis vraiment enthousiasmé par cette perspective.

BRUCE LEE : Il est temps que nous ayons un héros oriental. Dans ce film, il y aura quelque chose qui touchera des personnes très différentes à des niveaux très différents. Il y aura assez de violence pour satisfaire presque n'importe qui. Ensuite il y aura l'étude de l'évolution d'un homme, et la façon dont Coburn rencontre des gens, découvre la mort et l'amour, à la recherche de l'ultime vérité.

ENTREVUE AVEC BLACK BELT (octobre 70)

LA PREPARATION DE LA FLUTE SILENCIEUSE

Un éminent artiste martial, un acteur au top et un scénariste primé ont uni leurs forces pour capturer « l'âme » des arts du combat sur celluloïd. Ils espèrent répandre le message de l'évolution d'un homme dans le cadre des arts martiaux.

C'était en fin d'après-midi et le soleil couchant offrait aux habituelles paillettes clinquantes d'Hollywood une abondante chaleur. La réunion a eu lieu au bureau d'affaires de la production Pingree, sur Sunset Boulevard. Une première entrevue exclusive a été accordée à Black Belt Magazine pour annoncer à la communauté des arts martiaux un prochain film, « The Silent Flute », qui est un effort de collaboration de Bruce Lee, James Coburn et Stirling Silliphant.
C’est une combinaison inhabituelle de forces pour une entreprise inhabituelle. James Coburn et Stirling Silliphant sont tous deux depuis longtemps étudiants en Jeet Kune Do auprès de Bruce Lee, mais plus que cela, c'est l'alliance et les tentatives de trois personnalités stellaires. Ils n'ont pas besoin d'être présentés, mais pour mémoire, Silliphant est un lauréat pour son scénario du film Dans la Chaleur de la Nuit, et a écrit les scripts de pilotes pour la série télévisée Route 66, ainsi que de nombreux autres scénarios. Mais plus important encore, Silliphant est le scénariste le plus convoité dans le pays aujourd'hui. Coburn s'est fait remarquer dans les films d'action allant de Les Sept Mercenaires, la série Notre Homme Flint, L'Enfer est pour les Héros, Les Jeux de l'Amour et de la Guerre, pour n'en citer que quelques-uns, et est actuellement paré pour un western qui nécessite une barbe et des cheveux hirsutes. Lee a fait du rôle de Kato dans la série télévisée Le Frelon Vert une sensation du jour au lendemain, mais c'est sa remarquable maîtrise des arts martiaux qui l'a catapulté à la célébrité, avec et sans les arts de combat.
La force motrice derrière cette décision de saisir « le cœur et l'âme » des arts martiaux au cinéma ne provient pas seulement d'un homme. Il s'agit d'un effort d'équipe, comme l'explique Lee, « Stirling et Jim font des arts martiaux le plus grand crédit jamais fait. Dans les films hollywoodiens, par le passé, les seules choses qui étaient mises en évidence c’est le typique cassage de décors. Pas une seule fois ils sont vraiment allés dans le vrai esprit des arts martiaux ».
« C'est un rassemblement de plusieurs forces », intervient James Coburn, « nous avons utilisé les arts martiaux pour la base de l'histoire, bien qu'elle ne soit pas strictement sur les arts martiaux. Les arts sont utilisés comme un outil pour décrire l'auto évolution d'un homme. Les arts martiaux deviennent alors vraiment un moyen de parvenir à une fin ».

FASCINATION POUR LA MÉTAPHYSIQUE ORIENTALE

Comme pour lui-même, Stirling a expliqué qu'il est très différent de James Coburn dans la mesure où il a été très occidental dans ses perspectives, mais il a toujours eu une fascination pour la métaphysique orientale. Il ne s'y est pas mis plus profondément comme Coburn, ni structuré son style de vie aux croyances asiatiques: « Je crois vraiment en elle », confie Silliphant, « J'ai un infini respect pour ça, et je suis dans l'écoute d’une grande partie de cela. J'ai trouvé que nous (Coburn et Stirling) avons une grande quantité de choses en commun dans nos croyances spirituelles. Les arts martiaux, en ce qui nous concerne est une partie de cette métaphysique, partie orientale de cette expression spirituelle. Nous savons qu'il est fondé sur l’aspect pratique. Nous comprenons ses origines et ses usages, mais nous n'étudions pas les arts martiaux à ces fins ».

« Tout cela mis à part, et le fait que ce soit un exercice merveilleux et nous sommes très friands de Bruce, je crois qu'il nous a enseigné beaucoup de tout ce que nous savons dans le domaine des arts martiaux -nous avons pensé que c'était un bon sujet pour un film. Un type de film qui n'a jamais été fait dans le cadre des arts martiaux. Nous avons commencé à nous réunir, de façon informelle dans les premiers temps ». Puis, avec de la régularité, maintenant les trois se réunissent plusieurs fois par semaine chaque fois qu'ils sont tous en ville.

Le scénario du film est centré autour de, comme l'explique Coburn, « l'évolution de l'homme dans le cadre des arts martiaux ». Le film ne se limitera pas à un style, mais aura un stade à partir duquel sera présenté différents styles et écoles d'arts de combats, peut-être avec un bon échantillonnage d'autres arts martiaux.
L'histoire a été écrite par Bruce Lee, mais le script du film est, à ce moment-là, en pleine mutation comme la version finale du projet sera l'aboutissement des réflexions et des personnalités de ces trois hommes. Ensuite, le scénario sera écrit par la main agile de Silliphant. Ils ont discuté le film scène par scène, séquence par séquence, écrit l'ébauche de toute l’histoire pour le scénario. Cette approche pour la production d'un film est une nouvelle façon de procéder, pas comme on obtient un script habituellement, l'esquisse des grandes lignes des personnages, correspondant aux acteurs, la caractérisation, et enfin la recherche d'une maison de production de film pour produire le travail. « Nous ne sommes certainement pas les premiers à le faire », explique Silliphant, « bien que nous soyons parmi les premiers d’une demi-douzaine ou plus. Mais nous sommes les premières personnes à avoir pris les arts martiaux dans le bon esprit et tenté de concevoir un film entier sur l'odyssée d'un homme. C’est la découverte d'un homme à la recherche de son âme, en utilisant comme exemple notre surface d'arts martiaux et les différents styles de combat à mains nues ».

BEAUCOUP DE SCÈNES DE COMBAT

Une des particularités qui pourrait avoir de l'importance auprès des lecteurs de Black Belt, en plus de la participation de Bruce Lee et du sujet traité, c'est qu'ils auront besoin de beaucoup de personnes pour jouer dans le film. Quand ils disent beaucoup de personnes, ça ne signifie pas nécessairement une quantité importante, mais plutôt dans certaines écoles de combats. Bruce va agir comme un super recruteur et il va vouloir montrer les différents styles de combats dans les arts martiaux avec une absolue authenticité. Ils veulent le meilleur des hommes à la disposition pour jouer un rôle dans le film. De toute évidence, ça sera filmé avec beaucoup de scènes de combat.
Une autre facette de cette entreprise est un autre souhait prévu par le trio. Ils ont l'espoir de produire un film documentaire qui sera diffusé en même temps que le film avec une campagne de publicité. Ce documentaire est provisoirement prévu pour les téléspectateurs comme une sorte d'accompagnement éducatif pour le grand public.
Une certaine forme d'éducation du public peut être nécessaire pour le film pour qu’il soit compris. Les subtilités de l'homme à travers l'évolution des arts martiaux peuvent être perdues. Mais Coburn, Lee et Silliphant sont les hommes qui élaborent une méthode de transfert de toutes les souffrances et des efforts déterminés pour leur film héroïque. Ils espèrent être en mesure de ne pas avoir le projet d'un film racontant seulement une histoire, mais aussi le sentiment et l'âme des arts martiaux et de l'artiste. En utilisant la vue, le son et l'identification du public au héros, l'espoir est de représenter tout un point de vue différent des arts du combat, tout comme le film « Easy Rider » l’a fait pour la moto. Pour chaque artiste martial soucieux, nos espoirs sont avec eux.
Entre-temps, le trio travaille sur les détails du film et devrait être en production d'ici le début de l'année prochaine. Bruce scrute le pays pour une possible utilisation d’artistes martiaux (une annonce est parue dans la revue Karate Illustrated en septembre), et sera directeur technique des scènes de combat, tandis que Stirling Silliphant révise le script. James Coburn affine la coordination du tout, et analyse la nature des personnages comme un réalisateur-producteur. Les stars du spectacle seront Coburn en tant que premier rôle et Lee le second.
Si cette production se révèle être un succès, Silliphant et Lee créeront une boîte de production où ils seront spécialisés dans les films d'arts martiaux. Mais cet écrivain prend les devants. Dans quelques mois, le premier vrai film d'arts martiaux américain commencera à se tourner sous les sons de « Lumière, caméra, action ».

STIRLING SILLIPHANT : Une grande partie de l'expérience d'enseignement/apprentissage par Bruce Lee, forme le contenu de « La flûte silencieuse ». En fait, les concepts de Bruce Lee sur la vie et toute sa philosophie des arts martiaux imprègnent toute l'histoire et le personnage principal de « flûte ».
Je suppose que vous pourriez qualifier les questions que soulèvent les arts martiaux et « La flûte silencieuse » comme découlant du noyau de ma propre vie, tout comme elles viennent de celle de Bruce et de Jim. « Flûte » retrace en fait l'évolution d'un jeune étudiant à travers les arts martiaux, son problème d'ego, son courage trouvé face à l'abîme de la mort, et enfin sa renaissance spirituelle. A un moment, notre personnage principal dit : « Je ne suis même pas sûr quelle épreuve j'ai traversé ou comment je suis arrivé là. J'ai encore des doutes, beaucoup de doutes ... Comment, sans me battre davantage, puis-je les résoudre ? »

JAMES COBURN : Nous avons juste commencé par définir une histoire, sur un homme dont le Yoga serait son art martial, et il y a un livre, il devait y avoir un but, la réalisation pour trouver le livre, et le gardien de ce livre était ce grand artiste martial. Il a dû passer par toutes ces épreuves, donc nous avons inventé toutes ces épreuves. C'était un mélange de beaucoup de contes Soufi et de quelques idées Zen.
Pour le scénario je suis en quelque sorte venu avec mes recherches sur le soufisme parce que j'étais plus impliqué dans les contes et histoires d'enseignement sur le soufisme, et ce genre d'enseignement allait très bien avec le contexte, donc nous avons emprunté un peu de ces histoires. Le reste était pure invention qu'on a amenée tous les trois si parfaitement. C'était vraiment beaucoup de travail agréable, nous nous sommes vraiment bien amusé à travailler sur le script et nous avons appris beaucoup de nos propres croyances. Bruce était impliqué dans l'aspect physique du scénario; comment pouvons-nous illustrer le côté physique du scénario. J'ai été impliqué avec le côté ésotérique, et Stirling a participé à le mettre dans une certaine forme. Et le fait de travailler à trois comme ça c'est toujours vraiment la meilleure façon de travailler. Je trouve que quand vous avez trois personnes qui génèrent une idée, vous n'êtes pas impliqués dans l’ego. Vous avez une connexion, et une force passive et neutre. Donc, ils travaillent tous ensemble pour illustrer l'idée. Et c'est ce qui s'est passé avec « La flûte silencieuse », et j'étais très fier, comme nous tous, du script original, mais comme les choses s'en vont vous savez, vous ne pouvez pas regarder en arrière. C'est tout maintenant, c'est juste une manifestation de l'éternel, comme le ballon sur l'échelle verticale plutôt que linéaire. Le joueur de flûte est aveugle parce qu'il y avait un artiste martial, un personnage célèbre qui avait été aveugle et nous avons voulu illustrer l'idée que la vue n'était pas nécessaire, que les autres sens étaient disponibles... pour se retrouver, que l'homme aveugle pouvait en faire plus parce que ses sens étaient tellement développés. Qu'il pouvait sentir les choses plutôt que de les voir ou avoir à les connaître intellectuellement. Il pouvait répondre instantanément, presque instinctivement. Je pense que nous sommes nés avec un très petit instinct. Les animaux ont de l'instinct, nous avons la conscience et afin de revenir au stade de l'instinct nous devons utiliser notre conscience pour faire ce cercle. Cord et l'homme aveugle étaient vraiment la même personne, et à la fin de notre scénario tous les deux étaient unis et devenaient un aigle qui volait dans le ciel et traversait l'écran, mais ils ne savaient pas comment faire ça pour « Circle of iron », ils les ont fait danser sur le sommet de la colline (rires). L'histoire avec l'homme-singe est qu'il a dû accomplir quelque chose, il a dû remporter un certain nombre d'épreuves. L'homme-singe était vraiment l'invention de Bruce Lee, parce qu'il y a une sorte de forme d'arts martiaux du singe où le singe est partout. Le singe sur votre dos, etc. Vous ne pourrez jamais battre un singe parce le singe va toujours loin de vous, dès que vous vous arrêtez il revient. Vous partez et il revient à nouveau. Tel était le défi de l’ego... où vous devez laisser tomber votre ego, vous devez devenir plus essentiel, garder l'ego en face de vous afin qu'il puisse prendre toutes les frondes et les flèches plutôt que d'avoir l'essence contaminée par tous ces non-sens, et c'était ça l'idée.

LA FLÛTE A L'ETUDE CHEZ WARNER BROTHERS

BRUCE LEE à WILLIAM CHEUNG (février 70) : Je ferai en Inde à l'automne prochain un film intitulé La Flûte Silencieuse pour Warner Brothers. Le film est basé sur l'art martial et sera distribué en 72. Tu vas l'adorer. J'ai écrit l'histoire originale. Le scénario est un effort commun, supervisé par Stirling Silliphant, un des scénaristes les plus doués d'Hollywood.

LINDA LEE : Une fois le scénario achevé, Silliphant s'est consacré à la finition en mai 70 et il fut prêt à remettre à Ted Ashley, dirigeant de la Warner Bros. Coburn serait la vedette et Bruce jouerait cinq rôles différents qui deviendraient un des grands attraits de l'histoire. La Warner a aimé le scénario et ils ont accepté de le mener à bien, mais ont mis une condition irrévocable: le film devrait être tourné en Inde, où la production avait une somme importante de roupies bloquées (l'argent que les films de la Warner avaient rapporté en Inde et que le gouvernement indien refusait de remettre aux États-Unis). Cela ne convenait pas avec l'idée originale de Bruce qui proposait une histoire orientale qu'il pensait tourner au Japon (et en Thaïlande et au Maroc) et l'Inde n'offrait pas les paysages qu'il souhaitait, et n'avait pas de lutteurs qui pourraient être à la hauteur du projet. Mais comme c'était mieux que rien, les trois hommes ont accepté la proposition.

ROMAN POLANSKI POUR REALISER LA FLÛTE ?

BRUCE LEE à LINDA LEE : Naturellement je suis allé skier aujourd'hui avec Roman, et bien que je me sois pris plusieurs fois une gamelle, tout le monde dit que j'apprends vite. En fin de compte ce n'est pas aussi amusant que prévu, bien que ce soit une grande expérience que d'être en Europe. Plus je vois les gens qui rentrent et qui sortent du chalet de Roman et plus je t'apprécie. La soi-disant jet-set est vraiment d'un ennui total à force de rechercher tous les extrêmes. Accompagner le groupe dans ses virées en boîte m'épuise complètement. Le temps glacial et les nuits sans sommeil ont obtenu leur dû. J'ai attrapé la grippe et je me sens misérablement faible, tout particulièrement lorsque je donne mes deux leçons quotidiennes. Il fait trop chaud dans la maison et trop froid dehors et je suis fatigué par l'environnement. Roman me traite vraiment bien, mais sa façon de vivre n'est tout simplement pas la mienne. J'écrirai à Jim pour lui expliquer que parce que Roman m'a fait partir si loin, j'étais bien obligé d'y séjourner un moment. J'espère qu'en compagnie de Stirling ils ont fait avancer au mieux notre histoire. En fin de compte ce voyage a été intéressant, j'ai observé une grande variété de gens rentrer et sortir de la maison. Une chose est certaine, je connais Roman un petit peu mieux, et je sens que cela aidera pour de futurs développements. Si ce n'est pas le cas, j'ai de toute façon un ami, et un élève. Il s'est vraiment amélioré dans sa pratique. Je serais de retour le mardi 3 mars, et crois-moi, Roman voulait que je reste encore.

ROMAN POLANSKI : J'ai rencontré Bruce en 1967-1968 grâce à ma femme Sharon Tate, qu'il a entraîné physiquement pour faire un film avec Dean Martin. Elle prenait un cours au studio avec Bruce Lee et elle m'a dit: « Il est absolument nécessaire que tu rencontres ce type. Il est fantastique ». Je ne le connaissais pas du tout, donc, un soir, elle l'a invité à dîner et je l'ai trouvé très intéressant, très drôle, toujours à plaisanter et à être au centre de l'attention.

BRUCE LEE (avril 70) : Je vais créer une compagnie cinématographique avec James Coburn et Stirling Siliphant. Je suis lassé par la vie de professeur de Boxe. Il est temps pour moi de démarrer des affaires par moi-même. Nous espérons avoir Roman Polanski comme réalisateur, je lui ai parlé de ce projet en Suisse.

BRUCE LEE à JHOON GOO RHEE (28 mai 70) : Je m'entraîne très dur maintenant pour être au top de ma forme pour le film, en essayant de me surpasser chaque jour.

10 JOURS DE REPERAGES EN INDE (Départ de Los Angeles le 29 janvier 71, arrivée à Bombay, New Delhi, Jaipur, Madras, Rajasthan, Goa, retour le 11 février 71)

JAMES COBURN : Nous somme allés partout en Inde. Chaque fois que nous allions quelque part, Bruce avait ce gant patte d'ours qu'il tenait dans une main et donnait un coup de poing avec l'autre! Il m'a rendu fou! (rires) J'ai dit : « Bruce, vas-tu arrêter, mec?! Tu secoues toute la voiture! » Il a dit : « Mais c'est pour durcir mes phalanges ! » « Je sais, mais ça me rend dingue! »

STIRLING SILLIPHANT : Pendant toute la durée du voyage, Bruce ne cessait de parfaire ses coups de pied, sa détente ou son coup de poing. On aurait dit un chat.
Bruce aimait amuser les enfants. Il faisait des tours de prestidigitation et donnait des démonstrations de kung fu. Même s'il y a plein de touristes occidentaux en Inde, les chinois sont plutôt rares et la présence de Bruce était remarquée. Bruce était toujours en train de se donner en spectacle. Il faisait disparaître des pièces de monnaie, même des couteaux et des fourchettes.


LINDA LEE : Bruce se taillait un petit succès partout où il passait, bien sûr, heureux de se montrer, de faire des tours et des démonstrations de kung fu devant les jeunes qui se pressaient en masse autour de lui. C'est que l'Inde est un antique berceau des arts martiaux. Bruce était très curieux de découvrir quel type de pratiquant on pouvait y trouver. D'entrée de jeu, il leur lança « Bien, voyons voir où vous en êtes. Ce que vous êtes capable de faire ».

JAMES COBURN : Alors, brusquement, c'est devenu un véritable chaos. Il y avait neuf types qui ont commencé à se battre comme des fous. En quelques minutes un garçon saignait de la bouche. Bruce a levé les mains et s'est écrié « Non! non! arrêtez une minute! regardez ce que je veux ». Sans aucun échauffement, Bruce leur a donné une petite démonstration. Ils étaient absolument effrayés. Ils n'avaient aucune conception de ce type de combat. Même moi qui le connaissais pourtant bien, je n'en revenais pas. Quand Bruce a arrêté sa démonstration, ils sont tous tombés à genoux en le suppliant de devenir leur maître. Bruce, découragé, nous a dit « Il me faudrait au moins trois ans pour arriver à entraîner chacun de ces garçons jusqu'à un niveau correct ».

BRUCE LEE : Je pensais que j'avais vu la pauvreté à Hong Kong lors de mon adolescence, mais la pauvreté à Hong Kong n'est rien comparée avec celle que j'ai vue en Inde. Je ne me suis jamais rendu compte que nous vivions bien jusqu'à ce que je sois là. Les mouches sont partout, la faim est courante. Les gens et les enfants supplient pour de la nourriture, quelques uns étendus le long de routes poussiéreuses, mourant par manque de nourriture. Cela pue et il y a des ordures partout. On a de la pitié pour eux, spécialement pour les enfants, mais on ne peut pas les aider. Si on leur donne à manger ou de l'argent, on créera une ruée d'individus. C'est réellement douloureux.

JAMES COBURN : Nous sommes resté un bon moment en Inde. Stirling, Bruce et moi avons voyagé à travers l'Inde à la recherche de la nature sauvage. En fait, nous n'avons pas pu la trouver. Nous n'avions pas une vue désertique sans qu'il y ait des milliers de personnes ou des villages ou des chameaux ou des bus qui allaient et venaient. Nous sommes allés partout en Inde, c'était un grand voyage que nous avons fait à cette époque. Nous avons commencé à Delhi, et bien sûr l'Inde est probablement l'un des pays les plus bureaucratiques. Nous avons essayé d'obtenir quelques roupies bloquées que Warner avait là-bas. Ils ont dit que nous pouvons débloquer l'argent, et nous avons dû voir le secrétaire du secrétaire du secrétaire ou qu'importe qui il était. Afin d'avoir le grand patron nous avons dû passer par une sorte de chemin détourné. Je connaissais quelques personnes en Inde et l'un d'eux est arrivé à connaître le véritable secrétaire du secrétaire, mais afin qu'il le fasse nous avons dû le forcer. Nous l'avons forcé cette nuit-là, ensuite nous devions avoir une rencontre avec lui le lendemain:
« A propos de Tara, nous ne pouvons pas appeler la femme Tara. » (l'indien)
« Et bien nous allons l'appeler Mary ou un autre nom. »
« Ah, d'accord. » (l'indien)
Et c'était son seul commentaire, donc nous avons signé la chose, nous avons obtenu que les roupies soient débloquées, donc nous avons eu 1 million de roupies pour faire le tour de l'Inde. Nous sommes allés au Rajasthan, ce qui était super et nous avons vu le désert là-bas mais nous n'avons pas trouvé la nature sauvage. J'ai pris quelques belles photos de Bruce donnant des coups de pied en sautant d'une dune de sable, les avez-vous vues? Il était tout en voltiges, c'était super. Nous avons passé, je pense, environ quatre jours au Rajasthan. Nous trois avons eu une réunion avec le Maharaja de la ville de Bikaner et avons dîné avec lui cette nuit-là qui donnait directement sur le bord du désert. Il était membre du parlement ici, il nous a fait visiter. Nous avons trouvé des endroits merveilleux, c'était un super séjour, nous n'avons pas vraiment trouvé un endroit que nous pourrions filmer. Nous sommes allés à Goa après ça, et tous les hippies étaient nus sur la plage et nous courraient autour. Bruce, Stirling et moi marchions sur la plage, et tous les américains et suédois qui étaient nus et tous les autres, ils étaient interloqués sur le fait de jouer avec des flûtes. « La flûte silencieuse », tous étaient préoccupés au sujet du titre. Le silence? C'est quoi? J'ai dit que c'est la flûte qui est jouée à l'intérieur, que lui seul peut entendre, c'est la clé, c'est l'essence même, c'est la chose qui l'amène à tout regrouper, bang! Stirling a vraiment mis du temps pour accepter ça, mais il a compris finalement, ouais c'est vrai. Notre voyage a été écourté en raison du tremblement de terre qui s'est produit là-bas. Nous étions à Bombay à ce grand hôtel, l'hôtel Taj Mahal de Bombay, ce merveilleux, magnifique hôtel. Nous étions tous restés dans la suite Maharani, les suites gigantesques qu'ils avaient là-bas, c'était vraiment beaucoup de plaisir. Mais nous n'avons jamais trouvé vraiment aucun endroit que nous pourrions filmer.

STIRLING SILLIPHANT : Un soir, Bruce est venu en colère me dire que c'était lui la vedette et non pas Coburn. Pour la première fois, je me suis rendu compte qu'il n'était pas seulement un grand maître de kung fu, mais aussi un comédien avec ses petits caprices. Je ne l'en ai pas moins respecté, mais j'ai cessé de l'idéaliser. « Je serai un jour une très grande vedette », disait-il, « plus importante que Coburn ou Steve McQueen ». Moi je lui disais « Tu rigoles, tu es un chinois dans un monde de blancs. » Et pourtant il avait raison.

BRUCE LEE à LINDA LEE : Linda, au moment où je t'écris, nous sommes dans une voiture avec Stirling Siliphant et Jim, traversant la campagne indienne. Nous allons rester assis pendant 16 heures à Caro, ajouté aux longues heures où je suis resté assis dans l'avion, ça fait vraiment dur pour mon dos. Cependant, la douleur est moins forte pendant la nuit. En tous cas, c'est une sacrée expérience pour moi. J'espère que tu pourras te joindre à moi au cours du tournage, ça s'annonce vraiment comme une très belle chose. J'espère que ma mère aura cessé de travailler, et qu'elle aura la possibilité de rester avec les enfants; l'Inde n'est décidément pas un endroit sain pour les enfants. Cela signifie que tu devras passer par Londres. J'espère m'arranger pour que tu puisses avoir un chauffeur si tu restes un jour ou deux pour y faire du shopping ou quoi que ce soit d'autre. Nous voici en bordure du désert (cela fait maintenant quatre heures que nous roulons) et la température augmente de plus en plus. Naturellement la nuit sera glaciale. Dans la dernière ville où nous sommes passés, nous avons séjourné dans un palais transformé en hôtel et nous avons des suites royales. La propriété s'étendait sur trois hectares, je t'en raconterai plus à mon retour. Bien je m'arrête ici car écrire dans la voiture commence à me donner la nausée. Crois-moi, la route est terrible! et la conduite est un cauchemar, attends d'en faire l'expérience.

FIN DU VOYAGE EN INDE/RETOUR AUX ETATS-UNIS

BRUCE LEE à MITO UYEHARA : Coburn a merdé. Il ne voulait pas retourner en Inde, donc il a raconté à la Warner que là-bas il n'y avait aucun lieu intéressant, à cause de cela, le projet s'est trouvé bloqué. Il a bousillé le projet alors que j'avais mis tous mes espoirs dans ce film. C'était la chance de ma vie. Si j'avais su, je ne l'aurais évidemment pas choisi comme associé.

JAMES COBURN : Je n'ai jamais vraiment été impliqué pour jouer dans le film. C'était une chose pour Bruce.

STIRLING SILLIPHANT : Coburn refusait absolument de tourner en Inde par souci professionnel, Bruce voulait le faire à tout prix pour des raisons sentimentales, et moi je pensais que nous devions faire le film pour devancer le marché. Vous devez me croire, si vous aviez lu le scénario original, en sachant comment Bruce et Jimmy auraient jouer dedans d'une certaine façon, ça aurait été quelque chose dont on se serait souvenu. Donc, si nous étions simplement rentré et dit à Warner « Okay, nous allons le tourner » nous pouvions le tourner. Mais Jimmy et moi avons senti que c'était mauvais pour le film. Nous sommes rentré et avons dit « Non, ça ne va pas ». Bruce ne comprenait pas vraiment cette décision. Il a estimé que nous pourrions contourner les problèmes de décors. Ce rejet par ses partenaires, ses amis les plus proches de Hollywood, lui a causé une profonde déception et souffrance. Certes, l'attitude de Bruce envers Jimmy et moi, était moins charitable qu'auparavant. Parce que, en effet, nous étions ceux qui disaient non à un rêve, un fantasme qui pour Bruce aurait résolu tous les problèmes. Je suis convaincu que c'était la déception de ne pas pouvoir filmer le film en Inde qui a aidé Bruce à se décider pour accepter l'offre de faire des films à Hong Kong.

BRUCE LEE à LEO FONG : La Flûte Silencieuse progresse vraiment bien. Nous rencontrons quelques problèmes avec les extérieurs, mais on devrait connaître très bientôt la date du démarrage officiel. Le voyage en Inde m'a lessivé.

BRUCE LEE à JHOON GOO RHEE : Depuis mon voyage en Inde, mon dos va couci-couça. La Flûte Silencieuse est toujours à l'étude chez Warner Brothers. Nous attendons la prochaine étape, c'est-à-dire l'approbation du nouveau budget qui devrait intervenir dans une dizaine de jours, ce qui entraînerait un nouveau voyage et ainsi de suite. A part La Flûte Silencieuse, je vais apparaître en guest star dans une nouvelle série TV intitulée Longstreet. J'ai crée une idée de série TV (The Warrior), et je devrais connaître les premiers échos d'ici deux semaines. Dans le même temps, je travaille sur une autre idée pour un film que je dois faire à Hong Kong (un film chinois).

BRUCE LEE à LARRY HARTSELL (juin 71) : Rien ne s'est développé autour de La Flûte Silencieuse, c'est une question de temps.

STIRLING SILLIPHANT : Jimmy Coburn, Bruce, et moi, voulions faire l’ultime film d'arts martiaux, qui n’avait pas encore été fait. Nous voulions montrer une histoire simple. C'était juste le voyage d'un homme d’un point A à un point Z, dans le cadre duquel il trouverait sa profondeur et il apprendrait, à partir de divers arts martiaux ligués contre lui, tous basés sur les disciplines du kung fu classique et du karaté. Nous avons également inclus des trucs birmans, et des techniques philippines et malaisienne. Nous avons travaillé dessus pendant environ un an, mais c'était un film très métaphysique et respectueux, et les producteurs n’étaient même pas juste méfiants, ils ne le sentaient pas du tout. Ce que nous avons obtenu de mieux était ici chez Warner Brothers, curieusement. Cela semble un peu étrange à dire, mais de tous les studios dans cette ville, Warner Brothers est pour moi l'endroit le plus spirituel. Ils y ont deux ou trois très bonnes personnes. Quoi qu'il en soit, ils ont vu les possibilités et ont émis seulement une condition, qu’il devait être filmé en Inde. Coburn et moi-même avions été en Inde, moi-même quatre ou cinq fois, et je persistais à dire que ça n’irait pas. (La seule raison pour laquelle ils voulaient le faire c’était parce qu'ils y avaient quelques roupies bloquées, et que si nous pouvions utiliser cet argent nous pourrions faire le film). Bruce était désespérée à l'époque et il voulait le faire quoi qu’il en soit. Coburn et moi lui disions toujours « L'Inde est un lieu désertique, juste plein de choses lourdes, et tu ne peux pas y trouver les environnements physiques dont nous avons besoin dans le film ». Comme un certain endroit en Turquie qui était morne. Ou le paysage brumeux du nord du Japon. Et nous avions besoin de rizières qui étaient très vertes, que vous trouvez seulement au Sri Lanka. RIEN de ça n’était en Inde. Et tout ces trucs à propos de « Ben, si vous filmez sous cet angle, et gardez ces millions de personnes hors du cadre, ça marchera ». Nous ne pouvions pas trouver une dune de sable! Nous allions sortir de ce foutu désert, près du Pakistan, en essayant de prouver ça à Bruce. A trois heures de l’après-midi, il y avait des pistes tracées par les bus sur les dunes et des centaines de personnes y étaient passés. L'Inde est juste pleine à craquer et c'est trop. Donc nous sommes rentrés et avons dit non, et Bruce avait le cœur brisé, et nous n'avons jamais pu le faire. À ce moment j’ai mis Bruce dans Longstreet et il a eu un retour formidable, beaucoup de lettres de fans, des offres, mais il a décidé de retourner à Hong Kong et tout a commencé.

BRUCE LEE à LEO FONG (juillet 71) : Je viens de terminer le tournage de Longstreet. J'y ai fait de l'excellent travail. Je pars pour Hong Kong dimanche matin pour faire deux films, The Big Boss et King of Chinese Boxer. Lorsque je reviendrai, je serai sans doute occupé par le tournage de La Flûte Silencieuse, un film cinéma (avec Fred Weintraub).

STEVE MCQUEEN : Cher Bruce, je te souhaite les meilleures choses pour toi. Tu es vraiment grand maintenant donc veille à garder les pieds sur terre. Mon meilleur pour toi, ta famille et, que tu sois dans une très bonne forme, dans la tête et dans le corps. Ton frère. Steve.

BRUCE LEE : Certaines personnes ne veulent pas me parler de mon succès dans le film que j'ai fait. Je peux sentir l'envie en eux. Mais pour Steve c'est OK. Il était vraiment heureux pour moi et a essayé d'aider, parce qu'il connaît les problèmes auxquels j'ai fait face.

BRUCE LEE : James Coburn n'a rien d'un bagarreur. Ce serait plutôt un grand romantique ! C'est un type super, très calme. Il s'est mis aux arts martiaux, parce que, pour lui, c'est comme un miroir dans lequel on se reflète. Personnellement, je pense que tout ce qu'on apprend, tout sans exception, c'est pour mieux se connaître soi-même. Et c'est ce qu'il recherche. Steve, en revanche, est quelqu'un de très tendu, de très nerveux. C'est un très bon élève, mais j'aimerais que les arts martiaux l'apaisent, le rendent plus détendu, plus calme, comme Jim.

BRUCE LEE à ROMAN POLANSKI (janvier 72) : Cher Roman, J'aurais dû écrire plus tôt, mais les choses vont si vite pour moi. Tu trouveras quelques extraits de presse pour que tu vois comment les choses vont pour moi, ici, en Orient. Je retournerai aux States à la fin de cette année pour parler affaire avec la Warner Brothers. Roman, je t'écris ceci en ami, et tu sais combien je m'implique dans les arts martiaux. « Si » les choses marchent pour moi avec la Warner, serais-tu intéressé de faire pour moi un film d'action et d'arts martiaux chargé de sens? Ce que tu connais des arts martiaux et de moi, ajouté au fait que tu sois un excellent réalisateur (tu as beaucoup d'admirateurs ici en Orient), m'a poussé à t'écrire. Cependant, si tu ne peux pas, ne te formalise pas. Prends soin de toi mon ami.

ROMAN POLANSKI : Bruce, ce qu'il voulait faire, ce n'était pas bâtir une histoire, mais faire une exhibition de lui-même.

STIRLING SILLIPHANT A HONG KONG (avril 72)

JOURNALISTE FLORENCE CHONG : Bruce va probablement jouer avec James Coburn dans The Silent Flute, une production américaine créée par le scénariste Stirling Silliphant. Ce sera un des premiers films d’arts martiaux orientaux réalisés par une société américaine. Monsieur Silliphant a rencontré Bruce à Hong Kong récemment pour discuter du film. Il espère obtenir de la société de production Sagittaire qui a produit le film Melody de financer le film. Le tournage du film est provisoirement prévu pour septembre de cette année.

STIRLING SILLIPHANT (20 avril 72) : Cher Bruce, je ne peux pas commencer sans te dire combien il est réconfortant de voir ton succès phénoménal. J'espère sincèrement que je serai en mesure de retourner à Hong Kong plus tard cette année et que nous pourrons mettre La Flûte Silencieuse devant les caméras. Crois-moi, je vais y travailler. Je tiens à te remercier et Raymond pour le super accueil. Le dîner était la meilleure cuisine chinoise que j'ai jamais mangée. En ce qui concerne Cannon Distributing Co, ils sont une petite compagnie, nouvelle et apparemment très efficace. Il y a deux ans, ils ont distribué un film appelé Joe et apparemment ont bien travaillé avec. En dépit de cela, je te suggère de ne pas traiter avec eux jusqu'à ce que tu aies l'occasion de comparer leurs performances avec d'autres petites boîtes de distribution similaires qui se forment aux États-Unis. C'est quelque chose qui vaut la peine d'enquêter en personne et je suggère que Raymond Chow s'envole pour ici et de rencontrer les différents distributeurs en personne avant de prendre toute décision définitive. Je vais, bien sûr, être heureux de l'aider de toutes les façons que je peux.

JAMES COBURN et ELMO WILLIAMS (producteur à la 20th Century Fox) A HONG KONG rencontrent Bruce Lee et Raymond Chow

L'ENTREE DU DRAGON AMERICAIN (janvier 73)

ROBERT CLOUSE: Bruce Lee et Raymond Chow sont allés aux États-Unis à la recherche d'acteurs et d'un réalisateur pour Enter the Dragon. Bruce se trouvait à l'Hôtel Beverly Wilshire. Il a appelé son ami, l'acteur Steve McQueen, pour lui dire qu'il était de retour de Hong Kong et qu'il est un acteur à succès à présent. Bruce s'est vanté que ses films chinois rapportaient beaucoup d'argent et qu'il allait faire un film pour Warner Bros. Il a vraiment insisté là-dessus. McQueen lui a dit « C'est très bien, Bruce ». Le lendemain, Bruce a reçu une photo dédicacée de McQueen « Pour Bruce Lee, mon plus grand fan. Steve McQueen ». Il a mis Bruce en colère, même si McQueen a probablement fait ça en plaisantant.

PAT JOHNSON : Steve ne se trouvait pas chez lui, aussi Bruce lui a laissé le message sur le répondeur. McQueen a décidé de lui faire une blague en lui envoyant une photo de lui avec la dédicace. Quand Bruce l'a reçue, il a appelé de nouveau McQueen pour lui dire qu'il était maintenant une grande star comme lui, qu'il n'était pas son fan et de ne plus jamais l'appeler son fan. Puis il a raccroché. McQueen se roulait par terre, mort de rire.

STIRLING SILLIPHANT : J'avais été engagé par Twentieth Century Fox pour écrire le scénario du nouveau film d'Irwin Allen, et comme avenant au contrat j'avais obtenu la promesse que La Flûte Silencieuse serait fait conformément aux exigences de Coburn. Quand j'ai appelé Bruce à Hong Kong pour lui faire part de ce que je croyais être une bonne nouvelle, j'ai été bouleversé par sa réaction. Il m'a dit que nous n'étions plus en mesure de nous payer ses services « De toute manière, vous ne pouvez pas vous offrir mes services. Tu sais que je touche un million par film maintenant ». Je croyais être assez intime avec Bruce et je pensais qu'il me suffisait de l'appeler pour qu'il soit d'accord. « Pourquoi devrais-je porter Coburn sur mes épaules ? » qu'il m'a lancé. Je me suis souvenu de ses caprices en Inde et je suppose que, d'une certaine façon, il voulait se venger pour les vexations qu'il croyait avoir subies durant le voyage. Il m'a reproché d'apprendre le karaté japonais et m'a dit qu'il considérait cela comme un acte de trahison. Tu es parti, lui ai-je répondu, qu'est-ce que je pouvais faire d'autre ? Il m'a demandé si nous allions faire le film sans lui. Je lui ai dit oui. Il s'inquiétait de savoir où nous pourrions trouver quelqu'un qui puisse le remplacer et jouer cinq personnages. Je lui ai dit que nous prendrions cinq acteurs différents, et si tu avais l'idée de revenir, je te suggérerais de ne jouer qu'un personnage. Cette idée de jouer cinq personnages fait un peu vieux jeu, dans le genre Lon Chaney. Ensuite Jim Coburn est allé le rencontrer avec Elmo Williams pour lui faire une offre et Bruce a rembarré Jim. Coburn ne savait pas encore que Bruce m'avait dit qu'il n'allait pas le porter sur ses épaules.

JAMES COBURN : La dernière fois que je l'ai vu, juste avant sa mort, il commençait à peine à s'habituer à la gloire, ce qui n'est pas une chose facile. Cela vous amène à faire beaucoup de choses qu'ensuite vous aimeriez bien n'avoir pas faites. Et Bruce ressentait alors cela, à cause de son succès. Il était sûr de lui.

BRUCE LEE : Ils ont essayé de me persuader de travailler avec eux sur le projet du film, mais je leur ai dit que j'étais trop occupé. Je ne suis plus intéressé. J'ai déjà trois films à succès derrière moi, j'ai ma propre maison de production, et je peux avoir un million de dollars dans n'importe quelle banque de Hong Kong.

LINDA LEE : Je pense que Stirling et Jim, ont été quelque peu choqués par la décision de Bruce, et même estimés qu'il était sous pression, après tout, c'était Bruce qui avait commencé le projet dans son ensemble, mais à ce moment-là, il y avait beaucoup d'autres demandes pour Bruce. Tout le monde le voulait et le rôle lui-même aurait été un pas en arrière pour lui. Il n'a jamais été ressenti pour autant que Bruce était en cause, mais la situation avait changé et il pensait que Jim et Stirling, étant deux professionnels expérimentés aussi, auraient été les premiers à reconnaître que leur propre décision aurait été semblable si ils avaient été placés dans la situation de Bruce. Bruce n'était plus intéressé à jouer dans un film dont il ne serait pas la vedette.

STIRLING SILLIPHANT : Lors de son séjour à Los Angeles pour ses examens médicaux (mai 73), j'ai invité Bruce à dîner en compagnie de Linda le samedi suivant, mais quand je lui ai annoncé mes fiançailles avec Tiana, Bruce m'a adjuré de la laisser tomber sous prétexte qu'elle avait deux enfants et que, de toute manière, il ne fallait pas faire confiance aux orientales. Je lui ai répondu que je la connaissais bien, qu'elle n'avait qu'une fille et que, de toute façon, on vit déjà ensemble. Et je sais parfaitement bien qu'elle a été Miss Karaté au dojo de Jhoon Rhee, à Washington. Cela m'a mis en rogne de voir qu'il était si macho. Le samedi matin, ma secrétaire m'a appelé, elle venait de passer une demi heure au téléphone avec Bruce. Bruce faisait dire qu'il ne se présenterait pas au rendez-vous parce qu'il ne voulait pas gêner sa femme en lui imposant la compagnie d'une fille comme Tiana. J'étais indigné. Ma secrétaire m'a dit que Bruce ne semblait pas détester Tiana, ce qu'il lui reprochait, c'était d'avoir brisé mon ménage. J'ai rapporté cette affaire à Tiana qui ne parut pas y attacher beaucoup d'importance. Bruce la traitait ainsi parce qu'elle était orientale, m'a-t-elle dit. La dernière fois que je suis allé à Hong Kong, j'ai rencontré Bruce à déjeuner et il était accompagné de deux orientales superbes. « Notre compte est bon pour l'après-midi » me dit-il, mais je devais partir tôt pour remplir un engagement à la télé. Bruce est resté avec les deux filles et le lendemain, il m'a dit « Ah ! Mon vieux, si tu savais ce que tu as loupé ! ». Il avait une étrange mentalité. Ce qui l'a le plus irrité à mon sujet, c'est que j'ai opté pour le Karaté japonais. Les trucs qu'il m'avait enseignés étaient fort utiles dans les combats de rues, mais si je devais affronter des ceintures marron dans un tournoi, sans parler des ceintures noires, je risquais de me faire démolir.

BRUCE LEE (juin 73) : Jim, je t'ai raté lorsque j'étais à Los Angeles, mais je t'ai laissé chez toi cet habit « super chouette ». J'espère que tu l'aimes. Tout est cool ici. J'ai parlé à Stirling et je lui ai dit qu'entre toi et lui, je déposerai notre Flûte Silencieuse entre tes mains. Toutes mes meilleures pensées, et reste cool.

ELOGE FUNEBRE (31 juillet 73)

JAMES COBURN : Adieu frère. Ce fut un honneur de partager cet espace de terre avec toi. Comme ami et comme professeur, tu as réconcilié en moi le physique, le spirituel et le psychologique.

STEVE MCQUEEN : Je me faisais du soucie pour Bruce, et je pense que ça va être une grande perte. Je me sens très mal par rapport à ça. Il était un gars merveilleux. J'avais envie de dire au revoir à un ami. C'est pourquoi je suis allé aux funérailles, pour rendre mes hommages respectueux et essayer que ça soit plus facile pour les personnes qui l'entourent.

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STIRLING SILLIPHANT (16.01.1918 – 26.04.1996)
JAMES COBURN (31.08.1928 – 18.11.2002)
BRUCE LEE (27.11.1940 – 20.07.1973)

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Sources pour les textes :

-Paroles de dragons par John Little, traduction de Christophe Champclaux pour Guy Trédaniel éditeur
-Vivre avec Bruce Lee par John Little, trad Christophe Champclaux pour Guy Trédaniel éditeur
-Correspondre avec Bruce Lee par John Little, trad Christophe Champclaux pour Guy Trédaniel éditeur
-Black Belt octobre 70, article traduit par Gabriel Grid
-Fighting stars février 74 et 77, interview traduite par Gabriel Grid
-VHS Mandarin superstar, édition Lumière UK, interview traduite par Gabriel Grid
-Circle of Iron, 2 DVD Zone All, édition Blue Underground, texte du magazine Flick traduit par Gabriel Grid
-La légende de Bruce Lee par Alex Ben Block
-La vie et la mort tragique de Bruce Lee par sa femme Linda 1975, édition René Chateau 1976
-Bruce Lee inédit par René Chateau
-Venice Magazine février 99, interview traduite par Gabriel Grid
-Five deadly hands juin 76, interview traduite par Gabriel Grid
-Insatiable world of Steve McQueen by Mito Huyehara, extraits traduits par Gabriel Grid
-Livret du DVD Bruce Lee le Dragon Immortel, Warner vision France
-The making of Enter the Dragon by Robert Clouse, extraits traduits par Gabriel Grid

Sources pour les photos :

Picture forum Bruce Lee 2007

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Vous venez de lire l'intégralité de ma compilation des interviews au sujet de La Flûte Silencieuse, dont une version malheureusement tronquée indépendante de ma volonté a été publiée dans la revue Dragon magazine n°16 de janvier-février 2015. (Gabriel Grid)

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 LES PHOTOS 

DES ETOILES SE RENCONTRENT:

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ENTREVUE AVEC BLACK BELT:

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10 JOURS DE REPERAGES EN INDE:

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STIRLING SILLIPHANT A HONG KONG:

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JAMES COBURN ET ELMO WILLIAMS A HONG KONG (Aéroport):

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JAMES COBURN ET ELMO WILLIAMS A HONG KONG (Bureaux):

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L'ENTREE DU DRAGON AMERICAIN:

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 ELOGE FUNEBRE:

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LES PERSONNAGES DU SCENARIO DE LA FLÛTE SILENCIEUSE (provenant du scénario de Bruce Lee)

« LE LIVRE » :
« Le Livre », la bible de l’art martial, supposée contenir la doctrine secrète la plus profonde du combat à main nue. Tous les dix ans un concours est tenu pour sélectionner le « Gardien du Livre », si aucun gardien ne peut survivre aux trois épreuves et trouver son chemin jusqu’à l’île.

CORD – LE CHERCHEUR (JAMES COBURN) :
Un conservateur de l’art martial qui en fait plutôt un but qu’un processus, et une fin plutôt qu’un moyen. Il vit l’art martial, il respire l’art martial. Il jure d’obtenir « Le Livre » et devenir le meilleur artiste martial. Cette histoire raconte le voyage de son âme -une Odyssée, une Quête- de la première rencontre avec Ah Sahm, l’homme aveugle, jusqu’au duel avec l’Homme-Rythme, au rejet du « Livre » et sa confrontation finale qui lui apporte l’éclaircissement.

L’HOMME AVEUGLE – AH SAHM (BRUCE LEE) :
Un chinois aveugle qui peut percevoir ce que les gens ne voient pas. Un homme éclairé qui a transcendé l’art martial et qui est le miroir qui reflète l’âme d’un homme –il est le subconscient de Cord lui-même, l’alter ego de Cord- son visage avant la naissance.

L’HOMME-RYTHME – CHANGSHA (BRUCE LEE) :
Un maître habile de l’art martial. Il a le rythme dans le rythme cassé et vice versa. Ses émotions explosives et sa dépendance sur les instruments de musiques externes pour « s’allumer » le mènent par la suite à sa défaite.

L’HOMME-MÉCANIQUE – SHABANI :
Le frère moine de Cord qui le guide –bien qu’à contrecœur- dans la première des Trois Épreuves.

L’HOMME-SINGE (BRUCE LEE) :
Le premier adversaire terrifiant de Cord. Ego –la Première Épreuve.

TARA :
Une fille qui conduit Cord à travers l’amour rituel du Yoga Tantrique –et lui enseigne l’ultime signification de l’amour –la Deuxième Épreuve.

L’HOMME-PANTHERE (BRUCE LEE) :
La Mort –la Troisième Épreuve.

YAMAGUCHI :
Le gardien du « Livre ». Il symbolise la religion organisée (par exemple, le Pape, l’Église Catholique, ou autre Foi institutionnalisée).

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Chaque homme doit chercher sa propre réalisation. Aucun maître ne peut la lui donner. 
(Citation tirée des notes manuscrites de Bruce Lee pour Silent flute, 1970)

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LE THEME

A la base, c'est l'histoire de la quête d'un homme sur la voie de sa libération, son retour à son sens de la liberté originelle. Au contraire du héros de western « le plus rapide de l'Ouest », le personnage n'a pas affûté ses outils pour détruire son antagoniste ; au lieu de cela, ses coups de pieds latéraux, ses revers de poing, ses crochets et ainsi de suite sont d'abord dirigés contre lui-même.

C'est du fond de soi qu'apparaît l'adversaire. Lorsqu'il n'y a pas de signe (ou de mouvement de pensée) germant dans votre esprit, aucun conflit d'opposition ne peut surgir. Et là où il n'y a pas de conflit (ou quelqu'un qui tente d'être meilleur que son voisin) il n'y a ni ego ni adversaire. Au mieux, les outils représentent la force intuitive, qui, au contraire de l'intellect ne se divise pas, ne bloque pas son propre passage. Cette force intuitive avance sans regarder derrière elle ou sur les côtés.

Le problème de base de l'artiste martial est celui du blocage mental. Il arrive lorsque le pratiquant est engagé dans un combat à mort avec son antagoniste, et que son esprit attache ses pensées à tous les objets qu'il rencontre. Au contraire de l'esprit fluide de la vie quotidienne, son esprit est arrêté, incapable de passer avec fluidité d'un objet à l'autre, sans se bloquer ni même accrocher. A ce point, l'artiste martial cesse d'être maître de lui-même, et il en résulte que ses outils cessent de s'exprimer dans leur totalité. Ainsi, avoir quelque chose à l'esprit signifie que l'on est préoccupé et l'on a pas le temps de se consacrer à autre chose. Cependant tenter de retirer cette pensée revient à remplir l'esprit avec une autre pensée !

En fin de compte, on doit être sans propos. « Sans propos » ne signifie pas que l'absence de tout prévaut. L'objet est de ne pas être entravé par le processus de la pensée. L'esprit est par nature informel, et aucun objet ne doit lui être accolé. Lorsqu'une chose est collée ici, votre énergie psychique est déséquilibrée. Son activité naturelle est handicapée et ne peut plus suivre le courant. Lorsque l'énergie est dirigée, elle se gaspille dans une seule direction, et elle manque dans une autre direction. Là où il y a excédant, il y a débordement incontrôlé. Là où il y a manque, il y a fragilité. Dans les deux cas, il y a incapacité de s'adapter aux situations en changement constant.

Mais là où prévaut l'état d'absence de propos (qui est aussi un stade de fluidité, d'esprit vide ou simplement d'esprit de tous les jours) l'esprit n'abrite rien, il n'est dirigé dans aucune direction ; il transcende à la fois le sujet et l'objet ; il répond aux changements de l'environnement et ne suit aucune trace. Pour citer les mots de Chuang Tzu : « L'homme parfait emploi son esprit comme un miroir, il n'agrippe rien, il reçoit mais ne garde pas ». Comme l'eau qui rempli l'étang, toutjours prête à couler ailleurs, l'esprit travaille avec une puissance inépuisable parce qu'il est libre et ouvert à toutes choses.

(Archives Bruce Lee, mai 1970)
(Source : Livre « Vivre avec Bruce Lee » par John Little, traduit par Christophe Champclaux, 2001 Guy Tredaniel éditeur)

bamboo_flute 

LA FLÛTE SILENCIEUSE
Une histoire originale 
Par Bruce Lee

Dans l’éveil pourpre qui chasse l'aube, à peine visible au loin, la petite image d'un homme qui monte la montagne embrumée. Enfin, il a atteint le sommet. Il reste là, une silhouette solitaire. Soudain, le silence de la matinée est ponctué par le son d'une humble flûte lointaine. Dans le même temps, le soleil se lève comme une grande et lente bulle d'air à travers l'eau découvrant une plus grande surface de peau, nous voyons un homme debout sur un pic, et un autre assis sur un alambic plus élevé, jouant de sa flûte. La lumière augmente, et dans un plan plus proche, l'identité de l'homme debout est révélée: James COBURN. Il regarde l'homme qui est assis sur la crête la plus élevée et il y a un air déterminé sur son visage. Comme il descend la crête, nous remontons dans le temps, révélant les événements qui ont conduit à ce moment.

La salle gigantesque de l'intérieur d'un temple. Au centre deux hommes se battent, l’un, porte une robe rouge, l'autre une jaune. Il y a quatre juges et un arbitre. Face à face et assis en deux rangées séparées se trouve des écoles d’experts en art martiaux, en robe jaune et en robe rouge. Deux moines âgés, l'un vêtu de rouge, l'autre en jaune, sont assis, immobiles, sur un autel. Assis entre ces deux moines, un vieux sage. Il est vêtu d'une robe rouge et jaune. Le but de cet événement est de choisir un champion parmi les robes jaune et rouge de la secte bouddhiste des arts martiaux. Le champion deviendra alors le représentant de la secte bouddhiste pour être le gardien du "Livre", la bible détenant le plus grand secret de l'art martial. Le gardien actuel est YAMAGUCHI.

Enfin, les juges décident que le point va au candidat à la robe jaune, et les deux candidats retournent dans leur groupe individuel. Il y a un bref silence, puis l'arbitre appelle le combat final entre James COBURN, en robe rouge, et le candidat en robe jaune vu dans le combat précédent.

COBURN s'incline devant son adversaire et le combat commence. Les sauts périlleux peu orthodoxes de son adversaire créent un problème pour COBURN et il a du mal à le saisir. Enfin, il réussit à marquer un point, cependant, que le combat reprend, l’insaisissabilité de son adversaire le met en défaut. COBURN est à la fois contrarié et frustré et ses émotions se voient dans sa technique. L'adversaire charge tout à coup, et au lieu d'utiliser une défense classique, COBURN arrête son adversaire d’un coup de poing frappé sèchement. COBURN est immédiatement disqualifié pour son acte violent, et la victime est couronnée champion et représentant de la secte bouddhiste pour la prochaine compétition la plus importante pour être le gardien du "Livre".

COBURN est convoqué à l'autel. Le vieux moine en robe rouge déclare qu'il est suspendu indéfiniment. On sent que COBURN est mécontent, le moine sage supérieur lui dit:

"Vous pensez que dans la vraie vie, vous auriez gagné, parce que l'adversaire est assommé. Eh bien, vous avez raison, en partie raison. Malheureusement, vous ne pouvez utiliser votre coup de poing pour assommer votre adversaire, mais votre poing ne vous a pas encore frappé. Vous êtes hors concours pour YAMAGUCHI, le gardien du "Livre".

COBURN est perplexe, mais il ne peut pas comprendre ce que le moine supérieur veut dire. Il salue et s'en va.

COBURN est sur la route. Ses effets personnels sont enveloppés dans un chiffon rouge attaché à son dos. Il passe par une forêt, et après avoir arpenté la région, il met en place un camp et commence à s’entraîner. Nous pouvons voir la barbe qui commence à pousser sur COBURN, indiquant une certaine longueur de temps d’entraînement. Un jour, alors qu'il s'entraîne, il a tout à coup conscience que quelqu'un le regarde. Il regarde rapidement autour et voit un homme assis qui se confond presque avec les buissons autour de lui. Comme COBURN s’approche de l'homme, il voit qu'il est aveugle, un Chinois dans la vingtaine avancée. Sans se retourner, l’homme aveugle fait des commentaires sur l’entraînement vigoureux de COBURN. COBURN se plaint à lui sur sa situation, et l'aveugle écoute en silence. Il jure qu'il sera un jour le seul possesseur du « Livre » et le meilleur pratiquant des arts martiaux. COBURN constate ensuite que l'aveugle exerce le métier de masseur, et joue de la flûte comme passe-temps. Son nom est AH SAHM et il a installé un camp à côté pour sa retraite. COBURN invite l'aveugle à marcher avec lui et lui demande s’il voudrait le masser après son entraînement quotidien, et AH SAHM accepte volontiers.

Nous voyons COBURN qui pratique une forme classique du style de la robe rouge. Il est dynamique, mais statique et mécanique. Tout à coup, le rythme de la flûte se fait entendre et le mouvement de COBURN prend également un écoulement plus fluide. Il est plus vivant dans l’expression de son mouvement et en harmonie avec la musique. Il est vraiment avec elle et l'homme et la musique fusionnent.

La journée touche à sa fin et AH SAHM pratique un massage sur COBURN.

La scène suivante on voit COBURN qui médite sous une petite chute d'eau. Il s’entraîne. Le rythme de la flûte se fait de nouveau entendre. COBURN sort de dessous la cascade. Il suit le son et se promène dans les bois. Soudain, la flûte s’arrête et on voit l'aveugle qui nettoie sa flûte. COBURN se tourne et s'arrête, il prend conscience du son des gazouillis des oiseaux, la douce brise du vent, le bruit calme de la nature. Le fort bruit de la cascade est vaguement entendu dans le fond. Bientôt AH SAHM reprend sa flûte, et les oiseaux dans les arbres commencent à se joindre à la mélodie. Certains d'entre eux volent près de AH SAHM et l'un d'eux se pose sur la flûte. La flûte de AH SAHM et le gazouillis des oiseaux fusionnent en un seul son. COBURN est fasciné.

Un jour, tout en s’entraînant, COBURN se rend compte que la flûte ne joue pas. Quand il part chez AH SAHM, l'homme aveugle est parti, comme il est apparu, tout à coup et rapidement. Il va lui manquer, mais COBURN doit retourner à son entraînement.

Quelque part dans un désert une tente est temporairement mise en place. Des gens arrivent sur des chevaux, chameaux, etc. Nous apprenons qu'il s'agit d'une convention zen et artistique où les représentants de tous les styles d’arts martiaux se rencontrent. Les entrées sont définies entre les enseignants et les étudiants. A chaque entrée, un homme annonce le style que la personne représente. Quand COBURN entre et est annoncé, nous voyons les réactions de ceux déjà présents: les représentants en robe rouge et robe jaune. De plus en plus d’instructeurs entrent, et nous constatons que l'ensemble affiche un air digne, rigide et froid typique d’un artiste martial, puis il y a un maître de danse, etc. Parmi les invités qui arrivent il y a l'Homme Rythme, un homme aux cheveux long, et certainement un artiste martial non conventionnel. Il est d'origine chinoise, dans la vingtaine. Il est venu accompagné de plusieurs jolies filles de différentes nationalités (ses concubines) avec en plus plusieurs musiciens. Après lui vient des parasites, pique-assiettes. Il n'attend pas d'être annoncé et marche droit avec son groupe.

COBURN observe la performance des différents maîtres, des pratiquants d’arts martiaux, des musiciens, des chanteurs, etc. Pendant son errance dans la convention, il trouve tout à coup la performance d’une danseuse très intéressante. Les mouvements de cette danseuse sont toujours fluides et son esprit toujours présent. Quand vient la fin d’un de ses mouvements, celui-ci commence à fondre et à couler dans le suivant. COBURN observe intensément, mais ne trouve pas de failles, psychologique ou physique, s'il devait combattre avec cette belle danseuse. Comme il la fixe, COBURN pense avoir trouvé une faille, mais comme il a involontairement tourné sa main, la danseuse se tourne et lui sourit, dissipant son anxieuse anticipation.

Après avoir montré les différentes formes d'arts martiaux du point de vue de COBURN, nous entendons une légère agitation, c’est l'un des adeptes de l’Homme Rythme qui se dispute avec un autre élève de cours d’arts martiaux. L'adepte de l’Homme Rythme revendique que le meilleur art martial est inerte, un modèle simple et stérile. Enfin, l'autre instructeur des étudiants se joint à l'argument. L'instructeur commence à faire des déclarations sévères. L’Homme Rythme lui dit que le seul homme vivant qui peut lui parler comme ça est YAMAGUCHI parce qu'il a la connaissance du "Livre". L'instructeur demande un combat pour prouver leurs déclarations. L’homme Rythme accepte volontiers et se retourne en souriant vers son groupe de musiciens.

PREMIER COMBAT

L'Homme Rythme fait face à un adversaire. Ils s'inclinent et l’adversaire se met immédiatement en position de combat. L’Homme Rythme reste là et regarde son adversaire. Tout à coup, le battement du tambour est entendu, ses musiciens commencent à jouer de la musique. L'Homme Rythme s'anime et se déplace en harmonie avec la musique. Son adversaire est perplexe. Nous allons souvent entrecoupées des plans ici pour voir le sérieux de l'attention que portent les observateurs sur l'Homme Rythme, en particulier COBURN. Les concubines de l’Homme Rythme soupirent et gloussent avec calme. Soudain la musique s'arrête et l'Homme Rythme lance immédiatement une combinaison d'attaques tonitruantes, les claquements des coups de pied et coups de poing brisent le silence. La concentration mentale de l’adversaire est cassée et il est soumis.

DEUXIEME COMBAT

A peine le premier homme parti en défaite, un deuxième homme apparaît. Ils s'inclinent, et son adversaire se faufile rapidement avec une combinaison d'attaques, espérant tirer profit de l'Homme Rythme. Quand l'Homme Rythme arrête l’attaque initiale avec vivacité, la musique reprend une fois de plus. L'attaquant est désespérément crispé dans la cadence de l’Homme Rythme et le poursuit avec des techniques futiles mais fortes. L'homme Rythme s’évade passivement et danse loin des axes et coups de pied de son adversaire. L'homme est vraiment dans le rythme de la scène et il danse partout. Enfin, fatigué de jouer avec la frustration de son adversaire, l'Homme Rythme envoie des attaques dévastatrices. D’une manière experte il bat son adversaire. L’Homme Rythme est vraiment échauffé par tout cela. COBURN veut tester son habileté parce qu’il est fasciné par l'Homme Rythme. Donc, le combat est prévu. Le combat commence, ils sont à peu près de force égale. Toutefois, le rythme du tambour commence à troubler la concentration de COBURN et l'Homme Rythme commence à être plus fort. (NOTE: Nous pouvons le montrer avec le battement de tambour qui peut prévoir l’intention de COBURN d'attaquer, rendant ainsi COBURN extrêmement conscient). COBURN s’empresse, perdant son équilibre à plusieurs reprises. COBURN est sur le point de perdre. Soudain, un bruit sec et pénétrant se fait entendre. Nous faisons un panoramique dans un coin et voyons que AH SAHM, l'homme aveugle, joue de la flûte. Le son apaisant commence à faire changer l'attitude de COBURN, passant de l'anxiété à une aisance graduelle de la tension. A cet instant, l’arrière plan commence à s’effacer, avec seulement des gros plans de AH SAHM et de l'homme qui tape sur le tambour, COBURN et l’Homme Rythme. La flûte parfois domine et vice versa. COBURN est de plus en plus cool, et l’Homme Rythme coupe son mouvement vers le bas, jusqu'à finalement un arrêt complet. Les deux combattants restent là, et les uns les autres se regardent tandis que continue le combat de la flûte et du tambour. Tout à coup, l’Homme Rythme attaque, mais rapide comme un éclair, COBURN intercepte et l'Homme Rythme faiblie! Toute la musique s’arrête soudainement quand l'Homme Rythme rebondit le plus rapidement comme il peut, s’incline et quitte la salle, avec ses musiciens et ses concubines qui le suivent. Ses autres disciples, voyant leur idole battu, sont en colère contre l'intervention de l'homme aveugle. Ils se liguent rapidement contre lui. Comme COBURN vient en aide à l'homme aveugle, deux des hommes volent et atterrissent en face de lui. COBURN réalise alors que l'homme aveugle n'est pas seulement un maître de la flûte, mais un artiste martial aussi. AH SAHM est entouré, mais les attaquants ne peuvent pas pénétrer sa sensible aura de défense. L'un des assaillants ramasse une sorte d’instrument qui a été laissé et commence à faire des sons forts avec. Le niveau des sons augmente et COBURN surveille attentivement, se tenant prêt à l’aider. Cependant, au milieu du son, l'homme aveugle prend maladroitement le rythme et commence à se déplacer avec celui-ci, un peu comme l'Homme Rythme, excepté qu’il manque de grâce. Puis, en phase avec le son, il fait tomber les attaquants un par un. Enfin, l'homme qui fait tout le bruit est le seul restant. Il s'arrête et regarde l’immobilité de l'homme aveugle et avec un frisson, il fuit.

Sept candidats arrivent à la maison de YAMAGUCHI. (NOTE: Il y aura deux ou trois musiciens supplémentaires qui accompagnent l’Homme Rythme). C'est une maison qui a une simplicité sophistiquée, avec un beau mais simple jardin zen. Un jardinier est en train de travailler; oh, aussi, il a le regard vide d'un simplet. Toutefois, il se brise en un sourire chaleureux quand il voit les invités. Deux jeunes garçons saluent les participants à leur entrée dans la maison. Les garçons les conduisent dans une salle d'attente. Pendant qu'ils attendent, nous pouvons voir des visages familiers: COBURN, l'Homme Rythme, le représentant de la secte bouddhiste, et quelques autres que nous n'avons pas vu. Bientôt, le thé est servi. Comme ils sont assis là, en silence en buvant le thé, les deux garçons apparaissent à nouveau. Ils invitent les invités à entrer dans la salle d’entraînement, mais avant de le faire, le garçon annonce que son maître a demandé que trois des sept candidats doivent retourner encore s’entraîner pour le prochain tournoi qui aura lieu dans cinq ans, car ils ne sont pas vraiment encore au niveau. Le représentant de la secte bouddhiste est parmi les rejetés. Les trois candidats sont laissés, tandis que les quatre autres (plus les musiciens de l’Homme Rythme) entrent dans une autre salle d'attente, située juste à l'extérieur de la salle d'entraînement avec seulement un rideau de séparation à partir du sol. Les quatre sont l’Homme Rythme, COBURN et deux autres. Ils sont assis là encore, silencieux, tandis que les deux garçons les quittent. Les garçons reviennent encore et l'un des candidats est demandé pour passer le rideau dans la salle d'entraînement. Bientôt des hurlements se font entendre, puis de nouveau le silence. Puis on voit un candidat rejeté qui sort sans dire un mot. Les deux garçons reviennent à nouveau et un autre concurrent est demandé. Cette fois, nous n'entendons que l’explosivité de chutes et de coups de pied. Encore une fois il y a un silence, puis on entend une discussion, mais on ne peut pas comprendre en raison de la distance. Ensuite, le candidat marche à reculons et comme il passe le rideau, il fait une profonde révérence, puis abandonne. L’Homme Rythme est le suivant, il entre avec ses musiciens. Bientôt la musique commence, mais seulement brièvement, car il s'agit d'un arrêt brusque. Puis on entend de nouveau parler vaguement, mais comme la voix approche le rideau, on peut entendre YAMAGUCHI dire:

"Le stade ultime de l'activité est l'inactivité; Le stade ultime du combat est le non- combat, et le stade ultime de la musique est sans musique. J’espère vous revoir à nouveau dans cinq ans".

L’Homme Rythme, avec ses musiciens, prend congé. Les deux garçons viennent à nouveau et COBURN est invité à l'intérieur d'une salle d'entraînement magnifiquement propre et spacieuse. On voit YAMAGUSHI qui attend au milieu de cette salle et il est avec ce jardinier qu’on a vu plus tôt hors de la maison. COBURN enlève sa veste et s'incline devant YAMAGUCHI pour se mettre en position de combat. YAMAGUCHI se met également dans sa position, prêt à combattre, et les deux hommes restent là et se regardent. L’un des deux porte une expression de regard vide. La sueur commence à couler et la lutte interne commence sans aucun mouvement physique apparent. Aucun « arrêt psychique » peut être fixé soit par un ou par l’autre et ils sont comme le son et l'écho fusionnés en un seul. Soudain YAMAGUCHI se détend, sourit et lui dit que «Le Livre» sera livré dans sa chambre s'il y attend. Il dit que les deux garçons vont lui montrer le chemin, et comme il prend sa retraite, il ramasse les outils de jardin, prêt à retourner à son travail, comme si rien ne s'était passé.

LA RENCONTRE FINALE

COBURN atteint le sommet du pic d'une distance de 30 mètres où se trouve l'aveugle qui est maintenant encore en train de jouer de la flûte. Soudain AH SAHM arrête de jouer, apparemment il a détecté au loin quelqu'un qui approche, mais reprend à nouveau après une courte pause. COBURN s’approche de plus en plus, comme il atteint bientôt le pic il sort des fléchettes de sa poche. AH SAHM joue encore de la flûte. COBURN pousse un grand cri, comme pour avertir AH SAHM, puis il jette tout de suite plusieurs fléchettes vers lui. Rapidement, l’homme aveugle en écarte une avec sa flûte tout en esquivant les autres. Les deux hommes sont maintenant à quelques mètres l’un de l’autre. Ils se tiennent là, silencieux et face à face dans leur position de combat. Tout ce qui est entendu aujourd'hui est le doux bruit du vent, gazouillis des oiseaux, etc. Rapidement COBURN donnent quelques rapides et fortes techniques tandis que AH SAHM répond avec la sienne. Ils s’interrompent à nouveau et se font face. COBURN n'est pas tendue, mais prêt, ne pense pas, mais ne rêve pas, n'est pas fixé, mais flexible. En substance, il est tout à fait tranquille et en vie, conscient et alerte, prêt à toute éventualité. Un contraste avec ses précédents combats.

Il y a quelques échanges en plus mais bien que les coups de pied et les coups mortels sont donnés, ils jouent avec désinvolture l’un avec l’autre et profitent de chacun de ces moments. La plupart du temps ils restent juste là avec une brève réaction économique à chaque intention d'attaque ou tout simplement ils reprennent leur respiration. Les deux combattants fusionnent en un seul. Le soleil se déplace, et le jeu de jambes de l'homme aveugle se déplace également, jusqu'à ce que le soleil soit éclipsé par la tête de l’homme aveugle du point de vue de COBURN. Puis, soudainement, comme la tête de AH SAHM se déplace, un flash de lumière couvre tout l’écran, un grand cri remplit les oreilles; quelqu'un a exécuté son mouvement. Avec l'aide d'un hélicoptère le plan remonte très rapidement, de sorte que si nous sommes en mesure de voir un homme perdre le combat, nous ne savons pas lequel a en fait perdu. Le cri s'estompe, aussi la prise de vue prend de la distance. Un autre plan montre le cadre paisible du soleil, le vent qui souffle doucement, le chant des oiseaux, puis la triste mélodie de la flûte.

FIN

(1ère version de 16 pages de la session d'écriture entre Lee, Coburn et Silliphant, traduite par Gabriel Grid)

(Version finale du scénario de 76 pages finalisé par Silliphant disponible en anglais sur la partie ROM du DVD zone all édité par Blue Underground du film Circle of Iron)

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Commentaires
T
Article pertinent et très complet même si nous ne saurons jamais qui était ce Bruce Lee.<br /> <br /> <br /> <br /> Poupette Leviathan.
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